Faire partie d’une communauté… Être accepté tel que l’on est.
Avoir du plaisir à être reconnu et reconnaître les autres.
Un rêve stupide, inavouable, vieux-jeu?
Certainement pas. La survie économique c’est bien sûr la base,
mais la « vraie vie », celle qui a de l’importance,
notre vie profonde, qu’elle soit privée ou publique,
ce n’est pas sur ce rocher sous-terrain qu’elle se nourrit.
C’est sur la terre meuble et fertile de notre culture.
Le vieux temps n’est plus à réanimer, il a passé.
Il nous reste la mémoire de ce passé et parfois la nostalgie.
Est-ce que c’est vrai que la vie était meilleure autrefois?
Certainement pas.
Certains aspects de ce passé nous séduisent nostalgiquement aujourd’hui,
mais la vie était bien sûr plus dure autrefois.
C’est là qu’on réalise que rêver du passé
c’est un peu rêver à « l’âge d’or »;
une autre manière de rêver le présent.
Si seulement on pouvait aller de l’avant en gardant du passé
seule la « substantifique moëlle » dont parlait Rabelais.
Ne pas laisser le néant de la standardisation gommer toutes les différences,
l’indifférenciation et l’indifférence prendre toute la place.
Notre nature devrait avoir horreur de ce vide,
mais de manière insensée, l’homme moderne s’en contrefiche.
« Ca ira, ça ira », son refrain est une berceuse qui lui permet juste de calmer un peu ses angoisses, de mieux gérer le chaos, le manque de repères de sa vie.
« C’est quoi, l’humain? »: Il l’a oublié.
Il pense que c’est seulement la liberté, l’égalité, mais il a oublié la fraternité.
On court, on court et on oublie de réinventer nos communautés.
A ces communautés, il faut des rituels, des valeurs humaines
(pas simplement « morales », n’en déplaise à l’UDC ou à Sarkozy),
tout autre chose que de l’individualisme et du matérialisme.
Où sont ces fêtes de l’échange autour d’un verre ou d’une fondue,
où on « réinventait le monde »?
Trop rares, hélas!
On passe notre vie à la gagner, et ainsi on la perd, assurément.
Les amis ne passent pas à la maison, comme ça, en coup de vent.
On leur attribue une soirée, une ou deux fois par année.
Les gens courent ne se voient pas, ne se saluent pas.
L’humanité paraît alors bien mal en point.
C’est là qu’on se sent presque obligé de rêver du passé,
et à son humanité qu’il faut défendre aujourd’hui,
et garder pour demain.